Blockchain ou constat de commissaire de justice ?

21 Fév 2023

Face à l’essor des technologies numériques comme la blockchain, une question se pose : le constat de commissaire de justice reste-t-il la meilleure garantie d’une preuve solide et pérenne ?

 

 

1. L’activité historique des commissaires de justice

 

L’activité des commissaires de justice, ex-huissiers de justice, dans le domaine de la constitution de preuves est historique.

En effet, les commissaires de justice peuvent réaliser des constatations dont la valeur probante sera garantie par leur statut et leur assermentation.

Ces constatations sont effectuées à la demande des particuliers. Elles peuvent aussi être initiées par les magistrats lorsque l’établissement d’une preuve s’avère nécessaire à leur prise de décision.

Le domaine des constats de commissaire de justice est très vaste : état des lieux, constat de voisinage, constat avant travaux, constat sur internet, etc.

Les commissaires de justice se sont également appropriés au fil du temps la matière du constat d’antériorité. Cette activité consiste à recevoir en dépôt un document, une création, une œuvre ou même un code source afin d’en prouver l’existence à l’instant du dépôt et de matérialiser l’antériorité de ce document.

 

 

2. La preuve de l’antériorité d’une création

 

La preuve d’antériorité par constat de commissaire justice

La preuve de l’antériorité d’un document permet de créer une présomption de paternité d’une œuvre. En cas de litige, contrefaçon ou plagiat, chaque partie doit prouver sa détention du document antérieurement à celle de son adversaire.

En matière de création intellectuelle (article L 112-2 du Code de la propriété intellectuelle), les textes précisent les méthodes pour constituer cette preuve. Parmi elles, on trouve le dépôt à l’Institut national de la propriété intellectuelle (INPI), l’utilisation d’une enveloppe Soleau, mais aussi le dépôt entre les mains d’un officier public et ministériel : le commissaire de justice.

 

La blockchain comme outil de preuve d’antériorité

La blockchain est en pleine émergence. Il s’agit d’une technologie mutualisée permettant un stockage et un horodatage de fichier, sécurisé par la multiplicité des participants.

Dans le cadre d’une blockchain, un grand nombre d’ordinateurs distants partage une base de données. Ces ordinateurs communiquent entre eux de façon cryptée, anonyme et sécurisée. Ils attestent tous de l’exactitude des informations contenues dans cette base de données.

L’usage de ce procédé dans le cadre de la preuve d’antériorité devient une évidence. Le dépôt d’un document ou d’une œuvre sur une blockchain permettra de prouver la date de son dépôt. Cela garantira également son stockage intangible et sécurisé.

Procédé économique et rapide, a priori techniquement fiable, il ne reste qu’à le faire reconnaître sur le plan juridique.

En effet, l’interprétation de l’utilisation d’une blockchain comme mode de preuve par les tribunaux fait encore cruellement défaut. Rien ne s’y oppose cependant : le droit permet aux justiciables d’apporter des éléments de preuve par « tous moyens » (article 1358 du Code civil).

 

 

3. Les limites de la blockchain sur les autres activités de preuve

 

Les limites matérielles

Concernant les autres activités de constat, l’usage de la blockchain reste à prouver. Et ce, notamment lorsque le constat nécessite un déplacement de l’huissier de justice sur le terrain.

Au-delà de la matérialité des faits, le commissaire de justice atteste du moment de ses constatations et de leur localisation. Ces deux éléments sont d’ailleurs les seules mentions incontestables du constat. Seule une action à l’encontre du commissaire de justice dans le cadre d’une procédure en inscription de faux en écriture publique pourrait les mettre en doute (ordonnance n°2016-728 du 2 juin 2016 relative au statut de commissaire de justice).

Ces éléments de temps et de lieu peuvent être stockés dans la blockchain et attachés aux éléments de preuve conservés. Pour autant, se posera toujours la question des conditions de leur collecte, de leur exactitude et de leur fiabilité.

On peut alors faire un parallèle avec les applications mobiles de constitution de preuves. Les limites juridiques de ces applications ne proviennent pas des conditions de stockage des éléments constatés. Elles naissent systématiquement de l’impossibilité de relier de façon intangible les éléments constatés à un lieu et un moment précis.

 

Les limites techniques

S’agissant des constat sur Internet, le commissaire de justice doit respecter un certain nombre de contrôles préalables. Ces contrôles portent sur leur connexion internet ainsi qu’aux conditions techniques du constat. Ils permettent de démontrer que les éléments constatés sont bien visibles sur Internet à un instant donné.

Le commissaire de justice va également détailler le parcours effectué pour atteindre la page.

La jurisprudence impose le respect de ces conditions techniques depuis plus d’une décennie, comme condition de validité du constat.

Une simple capture stockée sur la blockchain ne présenterait donc aucune valeur probante, sauf à ce que l’opérateur puisse justifier lui-même du respect de ces prérequis techniques.

 

Face à ces difficultés, l’intervention du commissaire de justice, seul ou en complément de ces nouveaux modes de stockage numérique de la preuve, reste la meilleure garantie d’une preuve solide et pérenne.

 

 

4. La blockchain au service du constat de commissaire de justice

 

Prise en tant que telle, la blockchain est un formidable outil de conservation fiable. Elle peut donc se mettre au service du constat de commissaire de justice. En garantissant la disponibilité du constat et son stockage intègre et sécurisé, elle permet aux commissaires de justice de tenir leur engagement de conservation des constats.

 

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